
BANGUI, le 25 novembre 2025 (CentraNews)— La République centrafricaine a clôturé, ce 24 novembre, la première édition de la Semaine mondiale de sensibilisation à la résistance aux antimicrobiens (RAM), organisée en partenariat avec la FAO, l’OMS, l’Institut Pasteur de Bangui, l’Ambassade de France et la Banque mondiale. Une mobilisation multisectorielle qui a permis d’alerter sur un phénomène qualifié de « silencieux mais dévastateur » par les autorités sanitaires.
FAO : « Une mauvaise utilisation des antibiotiques accélère les résistances »
Interviewée en marge de l’événement, Madame Labia Ivette Irène Ouoba, représentante de la FAO en Centrafrique, a rappelé que la mauvaise utilisation des antimicrobiens, en médecine humaine comme dans l’élevage, favorise l’apparition de microbes devenus insensibles aux traitements.
« Nous avons souvent tendance à arrêter un traitement après deux jours parce que nous nous sentons mieux. Cela favorise les résistances », a-t-elle expliqué, soulignant également les abus constatés dans les secteurs de l’agriculture et de l’élevage.
Selon elle, cette première édition marque un tournant mais impose une action continue : « La lutte couvre de nombreux domaines, de la surveillance en laboratoire au renforcement du cadre juridique. Nous devons poursuivre les sensibilisations tout au long de l’année. »

Le gouvernement salue une mobilisation “exemplaire”
Au nom du ministre de l’Enseignement supérieur, le Professeur Jean Kokidé, directeur de cabinet, a salué l’engagement des partenaires techniques et des ministères impliqués.
« Cette semaine a mis en lumière un fléau grandissant : la résistance des microbes aux médicaments, un enjeu qui dépasse la santé. C’est une menace pour l’agriculture, l’environnement et l’économie », a-t-il déclaré.
Soulignant la nécessité d’une approche Une seule santé, il a appelé à renforcer la surveillance, la réglementation et la sensibilisation à tous les niveaux. « La fin de cette semaine ne marque pas la fin du combat, mais le début d’un engagement plus fort. »OMS : “Si nous n’agissons pas maintenant, nous perdrons des décennies de progrès médicaux”
Pour Madame Carolina Clarinval, représentante de l’OMS en Centrafrique, la RAM constitue l’un des défis sanitaires majeurs du siècle.
Elle rappelle que 1,1 million de décès ont été attribués en 2021 aux infections résistantes dans le monde, un chiffre supérieur à ceux du VIH et du paludisme.
La RCA, elle aussi touchée, fait face à des facteurs aggravants : automédication, prescriptions inappropriées, utilisation anarchique des antibiotiques dans l’élevage, manque d’accès au diagnostic, faiblesse de la surveillance.
« La résistance antimicrobienne peut ramener nos systèmes de santé des décennies en arrière », a averti Clarinval, appelant les autorités à investir davantage dans le plan national de lutte contre la RAM et dans le renforcement des laboratoires.

Un engagement collectif salué par le comité d’organisation
Le comité technique en charge de la RAM s’est réjoui de la « forte mobilisation » observée tout au long de la semaine.Campagnes de sensibilisation, formations, conférences, caravane communautaire : autant d’activités qui ont permis de rapprocher la population des enjeux d’une utilisation responsable des médicaments.
« Votre présence témoigne d’une prise de conscience croissante face à une menace qui touche notre santé, notre économie et notre avenir », ont affirmé les organisateurs.
Institut Pasteur : des données alarmantes à BanguiLe Directeur général de l’Institut Pasteur de Bangui, Professeur Rivalyn Emmanuel Nakoune Yandoko, a livré un constat particulièrement préoccupant :85 % des bactéries identifiées dans des prélèvements réalisés à Bangui sont résistantes aux antibiotiques disponibles.
« C’est dramatique. Certains patients n’ont plus aucun traitement efficace », a-t-il alerté, précisant que les taux de résistance sont encore plus élevés chez les animaux de compagnie analysés dans le cadre des enquêtes environnementales.
Appelant à une riposte coordonnée, il a insisté sur la nécessité de stopper l’automédication et de renforcer les diagnostics avant toute prescription.
« Nous avons le choix : baisser les bras ou affronter cette résistance avec détermination. Ensemble, nous pouvons vaincre. »
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